Méditation et pleine conscience : bénéfices et exercices
Écrit par Sean Singer, vétéran, yogi et instructeur en santé physique au sein de l’établissement EHN Canada de Bellwood.
Ce début d’année n’a pas été facile. Conflits au Moyen-Orient, écrasements d’avions, crises politiques, éthiques douteuses venant d’un certain président au bronzage orange et un confinement global causé par la pandémie du COVID-19. Le tout, juste avant l’arrivée de notre cher printemps ! Sans aucun doute, on ressent tous les effets que ces chamboulements ont causé dans nos routines et nos vies. Alors, en cette période si étrange, comment faire de la limonade avec tous ces citrons? La pleine conscience et la méditation, qui existent depuis très longtemps, sont des méthodes efficaces qui peuvent nous apporter beaucoup de bénéfices. Elles peuvent comprendre plusieurs types de méditation, mobile ou immobile ou même la participation consciente à des passe-temps ou à d’autres activités récréatives. On peut croire que la méditation et les activités récréatives ne devraient pas être regroupées dans le même panier parce qu’à première vue, elles semblent avoir des objectifs et des résultats différents. Pourtant, je suis de l’opinion que les deux sont très utiles et nous aident à développer une conscience de soi qui apaise et tranquillise l’esprit.
La méditation est un entraînement du cerveau.
—Oprah
Maitriser nos pensées accélérées : autorégulation et contrôle de nos pulsions
Notre esprit est toujours si occupé ! Les gens disent souvent que leur esprit est « occupé » pour décrire un flot constant de pensées intrusives qu’on n’arrive pas à contrôler. Quand on veut faire quelque chose ou prendre une décision, on a souvent du mal à se concentrer ou à bien réfléchir, d’où l’importance de savoir immobiliser son esprit. Un esprit immobile ne veut pas dire un esprit vide de pensées. Ce n’est pas comme ça que notre esprit et notre cerveau fonctionnent. Au lieu de résister à ces pensées, il s’agit de les laisser passer. Pour imager le conseil d’un Maitre Zen, votre esprit est comme une maison dont la porte d’entrée et la porte arrière sont ouvertes. Lorsque des pensées arrivent, laissez-les passer plutôt que de leur servir un café. Bien sûr, tout cela est plus facile à dire qu’à faire ! C’est pour cette raison qu’on doit entraîner notre cerveau à reconnaître les moments où on propose à nos pensées intrusives de rester prendre un café. Si vous ne développez pas l’habilité de les abandonner, ces pensées nocives seront toujours des obstacles qui vous empêcheront de réaliser les choses qui vous tiennent à cœur. Les pensées contreproductives, telles que le discours intérieur négatif, le fait de toujours trouver des excuses ou de blâmer les autres, devraient pouvoir quitter votre esprit aussi rapidement qu’elles y sont entrées.
La distanciation sociale et le confinement dus à la pandémie du coronavirus ont donné aux gens plus de temps pour se pencher sur eux-mêmes. Malheureusement, on va souvent dédier ce temps à écouter un film, jouer à des jeux vidéo ou consommer toutes sortes de choses qui détournent notre attention du moment présent. Détrompez-vous! J’adore moi aussi toutes ces activités mais la clé consiste à réussir à réguler le temps qu’on passe à les faire. L’autorégulation et le contrôle de ses pulsions sont des habiletés avec lesquelles la plupart des gens ont du mal à composer. On connait pourtant nos limites car notre instinct nous signale quand il est temps d’arrêter. Cependant, on a tendance à ignorer la petite voix dans notre tête qui nous dit quand c’est assez. Lorsqu’on est à la maison en train de regarder des séries excessivement ou de grignoter sans arrêt, on sait très bien qu’on ne devrait pas manger ce dernier morceau de chocolat ni appuyer sur le bouton « vous êtes encore là ? ». Pourtant, on le fait quand-même. Alors, comment peut-on cultiver une meilleure conscience de cette voix intérieure pour améliorer son autorégulation et le contrôle de ses pulsions ? C’est exactement ce qu’on fait quand on pratique des techniques de méditation et de pleine conscience.
Nous sommes limités par notre inhabilité à accepter l’inconfort
Quand on demande aux gens ce que représente la méditation pour eux, la réponse est souvent la même, surtout venant des gens qui ne l’ont jamais pratiquée : “vous vous assoyez en tailleur et chantez OM ». Pendant longtemps, la méditation était vue comme une pratique ésotérique qui n’était pas accessible à la personne moyenne. Cependant, il existe plusieurs façons de méditer afin de devenir conscient de son corps et de son âme. S’assoir en tailleur et chanter «OM» en est une, mais au final, peu importe le type spécifique de méditation, le fait d’être physiquement immobile aide à concentrer son esprit. Une position assise est normalement la meilleure option de départ et ce, pour tous les niveaux. Il y a 2500 ans, Bouddha s’est assis sous l’arbre de la Bodhi pour méditer jusqu’à ce qu’il atteigne l’éveil. Aujourd’hui, vous pouvez toujours utiliser cette même technique de méditation, qui s’appelle « Vipassana » et qu’on peut traduire à peu près par « inspection » ou « vue profonde ». Cette technique relativement simple consiste à rester assis pendant une heure et observer son souffle et ses sensations. Elle est souvent enseignée dans le cadre d’une retraite silencieuse de 10 jours, durant laquelle on dévoue son temps à l’introspection et l’apprentissage de la rencontre de soi-même. Tout ça peut s’avérer un peu inconfortable sur le plan physique et mental.
On passe la plus grande partie de nos vies dans notre tête. On reçoit de l’information sur notre environnement à travers nos sens et on l’interprète dans nos têtes. C’est important de reconnaitre que chacun va avoir sa propre interprétation car ce qu’une personne perçoit comme étant de l’inconfort peut ne causer aucun problème chez une autre. Ça veut dire que tout le monde a sa propre expérience unique et que ça ne sert à rien de comparer les expériences des uns et des autres. Au lieu de penser à ce que les autres sont en train de faire ou comment ils nous perçoivent, on apprend à se concentrer sur son moi physique, à travers sa respiration et ses sensations. Ceci nous mène à ressentir de l’inconfort. Il est très possible que l’inconfort ait été un des facteurs qui ait motivé le développement de l’intelligence humaine. Des industries entières se consacrent à rendre les choses plus confortables pour les gens. Que ce soit de l’eau courante, des toilettes avec des chasses d’eau, des canapés inclinables ou des sandales « Crocs », on fait tout pour éviter l’inconfort. D’ailleurs, on nous apprend dès la naissance à rester confortablement au chaud, alors pourquoi diable voudrions-nous connaitre l’inconfort ?
La méditation en pleine conscience : s’asseoir avec l’inconfort
S’asseoir avec l’inconfort est probablement l’aspect le plus important de toutes les pratiques de la pleine conscience. Non pas juste l’inconfort physique, mais aussi émotionnel et psychologique. Ceci est particulièrement vrai lorsque notre routine est perturbée, qu’on ne peut plus faire ce dont on a envie et que les choses qui nous apportent un certain confort ne sont plus disponibles. La première fois que j’ai pris un cours de méditation Vipassana en 2006, j’ai appris à vivre avec l’inconfort. Son effet sur ma vie a été profond. Pendant les années passées dans l’armée, j’ai pu ressentir de l’inconfort à plusieurs reprises dans des situations où j’étais mouillé, j’avais froid, chaud ou soif ou encore, quand j’étais fatigué ou sale. Cependant, le fait d’être assis immobile pendant une heure, deux à trois fois par jour est sûrement l’inconfort le plus intense que j’ai connu.
Je n’avais aucun problème à m’assoir en tailleur. En revanche, la position idéale est toujours d’avoir ses genoux au même niveau ou même plus bas que ses hanches. Ceci s’avérait impossible pour mes genoux. J’ai passé les premiers quatre jours à essayer de me mettre à l’aise en mettant des piles de coussins en guise de supports pour mes jambes, mais rien n’y faisait. Le cinquième jour, j’ai tout simplement cédé aux sensations d’inconfort dans mes hanches et mes jambes. Tout d’un coup, tout s’est relâché, mes hanches se sont assouplies et mes genoux se sont baissés par eux même.
Cependant, psychologiquement, ça n’allait pas beaucoup mieux. J’écoutais mon propre bavardage mental en me demandant ce qui était réel : « est ce que je suis en train d’imaginer cette sensation ou est-ce que je ressens vraiment quelque chose ? » ou alors « Oh, cette personne médite beaucoup mieux que moi ! » et ainsi de suite. On nous apprenait à reconcentrer notre esprit en prenant tout simplement une profonde respiration dans le but de revenir à la contemplation de notre respiration et de nos sensations. Quand on remarquait une distraction ou un sentiment d’inconfort, on devait les reconnaitre, les observer et continuer à respirer. Il faut se souvenir que rien n’est permanent. C’est ça qui m’a donné beaucoup de réconfort quand j’ai dû affronter plus tard dans ma vie des situations et des événements inconfortables. Rien n’est éternel, il y a un début et une fin à tout. Pourquoi passer autant de temps à s’attarder sur la misère, sachant que tout cela va éventuellement passer ? Comprendre et accepter la nature transitoire de la souffrance est donc un des nombreux avantages de la méditation.
La méditation en mouvement : renforcer la connexion entre le corps et l’esprit
Si rester assis de façon parfaitement immobile pendent une heure n’est pas votre tasse de thé, vous pouvez toujours retrouver des bénéfices très semblables en pratiquant la méditation en mouvement. Ça peut être aussi simple que de se rendre compte que l’on marche lorsqu’on se promène, en observant nos pieds atterrir et décoller du sol. Sinon, vous pouvez aussi essayer des disciplines spécifiques telles que le Qigong, le Yoga les arts martiaux ou la danse. Dans un premier temps, il est possible que vous ressentiez que votre esprit est distrait par votre respiration et vos mouvements. Cependant, si vous restez attentif à la façon dont votre corps bouge tout en contrôlant votre respiration, vous améliorerez la connexion entre votre corps et votre esprit.
La méditation en mouvement peut se faire à la maison et sans matériel. Vous pouvez en faire quand vous le voulez et vous trouverez sur Internet plusieurs vidéos de méditations guidées. À partir du moment où vous bougez, respirez et restez conscients et présents dans le moment, vous êtes en train de méditer en mouvement. Faites-le en marchant, en faisant la vaisselle ou en brossant vos dents. Peu importe ce que vous faites, l’important est de tout observer avec pleine concentration et être attentif à tous les détails. Ce niveau d’état de conscience élevé a le pouvoir d’affecter la chimie de votre cerveau, améliorant ainsi votre habilité à penser et à fonctionner. La pratique du Qigong remonte à environ 4000 ans et comprend un répertoire de plus de 6000 poses et mouvements. Ne vous inquiétez pas, vous n’avez pas à tous les apprendre ! Je suis sûr que vous trouverez certains mouvements qui vous plairont. Le Qigong est une méditation en mouvement très douce et une session peut se limiter à 5 ou 10 minutes. Ses bénéfices sont si puissants qu’il est possible que vous ressentiez des changements subtils presque immédiatement.
Secouer sa dissociation
L’isolation peut parfois entraîner une dissociation, c’est-à-dire une perte de contact avec la réalité et le moment présent. La dissociation fréquente peut causer de la dépression et de l’angoisse sans même que vous vous en rendiez compte. On associe aussi la dissociation avec un système immunitaire plus faible, ce qui vous rend vulnérable aux maladies, chose à éviter à tout prix durant la pandémie du coronavirus. En entraînant votre cerveau à travers la méditation, vous développerez une l’habilité à reconnaître rapidement les moments de dissociation et de rumination sur le passé ou le futur. Une fois cette habileté acquise, il vous sera plus facile de revenir à la réalité. Cette habilité développée à travers la méditation, vous aidera aussi à rester concentré et de façon générale et à être moins distrait.
La méthode Wim Hof et son influence sur votre système nerveux autonome
D’autres types plus spécialisés de travail respiratoire et de méditation peuvent vous apporter des bénéfices particuliers en affectant votre physiologie. Une de ces méthodes, qui bénéficie d’un soutien scientifique, est la méthode Wim Hof. Celle-ci implique un travail respiratoire, une thérapie par le froid et de la détermination. Wim Hof souligne que les humains ont la capacité de s’adapter aux facteurs de stress naturels et en particulier aux environnements froids. Il observe que pour entraîner son corps et son esprit à améliorer sa capacité d’adaptation, il faut faire des choses inconfortables comme prendre des douches froides, retenir son souffle et se tenir à l’envers.
Les gens qui se dédient de façon constante à la pratique de la méthode Wim Hof ressentent plusieurs bienfaits pour leur santé comme par exemple, l’habileté d’affecter de façon volontaire leur système immunitaire. Des scientifiques hollandais ont d’ailleurs effectué une expérience durant laquelle ils ont injecté Win Hof et certains de ses étudiants avec de l’endotoxine. Un groupe témoin, qui n’avait aucun entraînement avec la méthode Win Hof a aussi reçu la même injection. Toutes les personnes du groupe témoin sont tombées violemment malades alors que Win Hof et ses étudiants avaient très peu de symptômes, si ce n’est aucun.[1] Les chercheurs étaient déconcertés car on croyait auparavant que les humains ne pouvaient pas volontairement affecter leur système nerveux autonome mais Win Hof leur a prouvé le contraire. Grâce à la méditation et la respiration, Win Hof et ses étudiants ont réussi à modifier délibérément le fonctionnement de leur système nerveux autonome, supprimant ainsi leurs réactions immunitaires.
D’autres activités pratiquées consciemment peuvent vous apporter des bénéfices similaires à la méditation
Si aucune des techniques décrites ci-dessus vous interpellent, il existe plusieurs autres options en forme de loisirs et de récréation. Vous pouvez essayer le coloriage, la peinture, la lecture, l’écriture, la pratique d’un instrument de musique, les jeux et les sports. Si elles sont exécutées de façon distraite, ces activités peuvent n’être qu’un passe-temps. Cependant, si vous les faites de façon concentrée, avec intention et conscience, vous ressentirez du calme et du contentement qui s’apparentent aux bienfaits de la méditation. Si vous n’avez présentement aucun passe-temps ni intérêt récréatif, c’est le moment parfait pour essayer quelque chose de nouveau, puisque vous ne pouvez pas sortir de la maison ! Vous pouvez, par exemple, commander un Ukulélé en ligne et commencer à en jouer. Vous trouverez sur Internet plein de vidéos et d’applications qui vous aideront à apprendre à faire du tricotage, jouer à des nouveaux jeux de carte, faire de l’artisanat ou du jardinage. En bref, les possibilités sont infinies.
Choisissez une activité qui vous intéresse, idéalement en dehors de votre zone de confort et qui, vous mettra au défi. Consacrez-lui un peu de temps chaque jour, en cultivant votre discipline et votre concentration. L’esprit humain résistera à toutes les choses nouvelles et inconnues. Les gens refusent de changer car le changement est un pas vers l’inconnu, ce qui nous fait peur à tous. Pourtant, rien n’équivaut la satisfaction que l’on ressent quand on réussit à surmonter notre difficulté pour passer à l’acte et qu’on réussit à atteindre les objectifs qu’on s’est fixés. Le fait d’apprendre une nouvelle activité stimulante et de s’y améliorer nous donne des objectifs et nous oblige à y prêter attention et à agir avec conscience. Ces états mentaux sont semblables à ceux que provoquent les pratiques de méditation et de pleine conscience. Ils nous procurent, par conséquence, des bienfaits similaires.
Votre pratique de pleine conscience est aussi unique que vous
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de pratiquer la méditation ou la pleine conscience. Si vous pouvez atteindre un état de clarté mentale et un esprit calme sans vous faire de mal, ni à vous ni à quelqu’un d’autre, alors continuez à faire ce qui fonctionne pour vous. Vous avez sûrement ressenti, au cours de votre existence, des moments « d’unicité » ou un sentiment d’être « dans la zone » mais il s’agissait probablement d’épisodes éphémères. En tant qu’être humain, nous avons un penchant pour les « bonnes vibrations ». Nous voulons retrouver le même sentiment, le même moment, qui nous a fait du bien, mais un autre moment ne peut être le même. Au lieu de perdre son temps dans cette poursuite futile, nous devrions observer nos pensées et nos sentiments qui vont et qui viennent, sans réagir et sans juger. C’est en soi la pratique de méditation et elle apporte beaucoup de bienfaits tels qu’un sentiment de calme et de paix ainsi que l’habilité de maintenir une concentration détendue et sans effort.
Le but ultime est de rester présent et ancré, de rester conscient de sa propre existence, de ses sensations et de sa respiration et de réaliser que l’on contrôle chacune de ses pensées, actions et réactions. En demeurant dans le moment présent, on réussit à voir les choses clairement et telles qu’elles sont. Une clarté mentale et une concentration accrues nous permettent de prendre de meilleures décisions. Alors, c’est à vous de choisir une pratique de pleine conscience et de vous lancer ! Si une technique ne vous parle pas ou vous rend mal à l’aise, essayez-en une autre. Continuez à expérimenter jusqu’à ce que vous en trouviez une qui vous convienne. Ensuite, engagez-vous et pratiquez avec constance et assiduité. N’oubliez pas que la méditation est un entraînement cérébral et qu’un meilleur cerveau profitera à tous les domaines de votre vie. Bonne respiration !