Soigner les héros du Canada
Le centre de traitement Atlantic Centre for Trauma d’EHN Canada offre aux militaires ainsi qu’aux anciens combattants et combattantes un nouvel endroit où se rétablir d’une dépendance ou d’un trouble de santé mentale.
« Je comprends ce que tu veux dire. »
Des mots si simples, mais qui revêtent une telle importance qu’un établissement entier leur est consacré en Nouvelle-Écosse.
Depuis son ouverture en octobre 2022, le centre de traitement Atlantic Centre for Trauma (ACT) reçoit dans ses 15 lits des militaires, des anciens combattants et combattantes, des membres des services d’urgence et d’autres premiers répondants et répondantes. Le personnel de cet établissement situé dans la vallée de l’Annapolis accueille les hommes et les femmes à qui, en tant que nation, nous avons demandé d’accomplir un travail parmi les plus difficiles.
Ces personnes doivent affronter des situations horrifiantes, des événements déchirants et des accidents tragiques, impossibles à oublier. Oui, elles sont formées pour faire face à ces conditions, mais cela ne signifie pas pour autant qu’elles n’en sont pas ébranlées.
Depuis 2013, EHN Canada forme un réseau d’établissements de soins de santé mentale de premier plan au Canada, offrant des programmes de soins fondés sur des données probantes pour le traitement de la dépendance, de la dépression, de l’anxiété, des troubles alimentaires et, dans ce cas-ci, des traumatismes. Cette initiative a commencé par le pavillon Ferguson de la clinique Edgewood à Nanaimo, en Colombie-Britannique, suivi du centre de traitement Gateway Recovery à Peterborough, en Ontario. Cela se poursuit maintenant avec le centre ACT.
UNE DIRECTRICE DES SERVICES CLINIQUES QUI A UNE PERSPECTIVE UNIQUE
L’ajout d’un centre de traitement dédié aux premiers répondants et répondantes dans le Canada atlantique est tout à fait logique lorsque l’on considère le nombre d’anciens et anciennes militaires vivant dans la région. Situé à Nictaux, en Nouvelle-Écosse, tout près de la clinique Ledgehill, le centre ACT est un second chez-soi, conçu spécialement pour les premiers répondants et répondantes. C’est un lieu de guérison, et de travail, que la directrice des services cliniques, Juanita Fleming, prend très au sérieux.
« Mon fils est dans la GRC, donc j’entretiens un lien très personnel avec le programme. Je vois ce que ses amis, ce que ses collègues traversent. Certains se sont enlevé la vie. Pouvoir travailler avec ces personnes qui croient qu’elles doivent garder leur sang-froid et se maîtriser tout le temps, parce que sinon tout va s’écrouler, ça me touche vraiment », explique Juanita.
Travaillant chez EHN Canada depuis 15 ans, Juanita compte à son actif près de 30 années de consultation dans des domaines variés, dont la toxicomanie et les troubles de santé mentale comme les troubles alimentaires, la codépendance, les compulsions sexuelles, le trouble de stress post-traumatique (TSPT) et les traumatismes liés au stress opérationnel. Elle a collaboré avec plusieurs familles et individus. En tant que travailleuse de première ligne faisant tout son possible pour aider les premiers répondants et répondantes, elle sait qu’elle est au bon endroit.
Le centre ACT se distingue des deux autres pavillons de la clinique Ledgehill par le fait que son programme est réservé aux militaires, aux anciens combattants et combattantes et aux premiers répondants et répondantes. Toutes les trois semaines, quatre nouvelles personnes peuvent commencer le programme. Comme dans tous les autres établissements d’EHN Canada à travers le pays, les patients et patientes du centre ACT bénéficient de traitements de haute qualité, y compris de soins spécialisés pour le traitement des blessures de stress opérationnel, des troubles de l’humeur, des troubles liés à la consommation de substances et des douleurs chroniques. Comme le centre compte seulement 15 lits, les groupes sont petits et tissent des liens étroits.
« Les patients restent jusqu’à neuf semaines s’ils souffrent aussi d’un trouble lié à l’usage de substances », explique la directrice. « Si ce n’est pas le cas, ils restent sept semaines. »
De nombreuses études peuvent justifier l’attention croissante qu’EHN Canada porte aux premiers répondants et répondantes. Selon l’organisme Reviving Responders, 32 % des militaires et des premiers répondants et répondantes au Canada recevront un diagnostic de TSPT au cours de leur vie. Ce n’est pas surprenant, puisque 90 % d’entre eux et elles seront exposés à des centaines d’événements à potentiel traumatique pendant leur carrière, comme le rapporte le Journal of Military, Veteran and Family Health.
Selon Wounded Warriors Canada, un organisme de soutien en santé mentale qui est partenaire d’EHN Canada, 44,5 % du personnel de sécurité publique au Canada souffrirait d’un trouble de santé mentale. La pandémie a exacerbé ce problème, alors que les listes d’attente pour obtenir de l’aide n’ont cessé de s’allonger.
« Je comprends ce que tu veux dire » est donc une phrase qui revêt une signification très personnelle pour tous les premiers répondants et répondantes. Membres des forces armées, agents et agentes de police, pompiers et pompières, ambulanciers et ambulancières : peu importe l’uniforme revêtu, un lien profond les unit.
FAIRE FACE À DE MULTIPLES TRAUMATISMES
Les patients et patientes du centre ACT trouveront en Juanita Fleming une personne qui a non seulement une formation diversifiée et 25 ans d’expérience dans le domaine, mais aussi beaucoup de vécu lorsqu’il est question de traumatismes.
Juanita a grandi pendant les années de l’apartheid en Afrique du Sud. Elle a obtenu un baccalauréat en sciences humaines à la Nelson Mandela Metropolitan University de Port Elizabeth, avant de s’installer au Canada en 2000. En 2004, elle a obtenu une maîtrise en psychologie du counseling à la City University of Seattle. Au printemps 2016, alors qu’elle résidait à Fort McMurray, elle a dû évacuer la ville en raison des incendies dévastateurs qui ravageaient la région. Elle est arrivée dans la vallée de l’Annapolis à l’hiver 2022 et, l’automne suivant, un ouragan frappait sa nouvelle province de résidence.
S’il s’agit de comprendre l’impact des traumatismes, Juanita est sans doute la spécialiste toute désignée pour travailler au centre ACT. Comme tout le monde, elle sait qu’il est important d’accueillir les patients et patientes là où ils en sont et de ne pas leur imposer un programme trop rigide. Juanita affirme qu’EHN Canada a écouté les besoins des premiers répondants et répondantes dans ses établissements partout au pays et a fait la bonne chose : leur offrir leur propre endroit où se rétablir, en compagnie de personnes qui comprennent leur réalité.
« Je crois que lorsqu’on nous enseigne les traumatismes à l’école, on nous apprend la façon théorique de les gérer, celle qui est expliquée dans les livres. Certains de mes traumatismes remontent à mon enfance, et j’ai subi de nombreux traumatismes tout au long de ma vie. Une chose que j’ai apprise, en particulier lorsque j’étais à Fort McMurray pendant les incendies, mais aussi maintenant que nous avons eu l’ouragan, c’est que la guérison d’un traumatisme a une dimension théorique, mais aussi une dimension humaine. Et ça, on ne peut pas l’expliquer dans les livres. On ne peut pas mettre tout ça dans une petite boîte et dire que ça va fonctionner pour tout le monde. »
C’est pourquoi les programmes et les options de traitement proposés dans les établissements d’EHN Canada sont flexibles et variés.
UN ENDROIT OÙ TROUVER DE L’EMPATHIE
Andrew est un ambulancier paramédical de la Colombie-Britannique qui cumule 20 ans de service. Il est aussi un ancien d’EHN Canada. Abstinent depuis qu’il a terminé son programme à la clinique Edgewood en 2012, il comprend en quoi le fait de réunir des premiers répondants avec d’autres premiers répondants est une bonne idée dans le cadre d’un traitement.
« La plus grande différence que j’ai constatée lors de mon traitement, c’est que d’autres personnes ont vécu leurs propres traumatismes qui les ont amenées à s’automédicamenter, ce que je comprends tout à fait, mais leurs traumatismes étaient généralement personnels et les touchaient directement. Nous, les premiers répondants, nous sommes confrontés chaque jour aux problèmes de multiples patients, et ça s’accumule. Ce ne sont pas des choses qui nous arrivent à nous personnellement, mais ça finit par nous changer et par changer notre vision du monde », explique-t-il.
« Nous sommes témoins de ce que les autres vivent et des conditions dans lesquelles ils se mettent et mettent leurs proches, si cela a du sens. Et de temps en temps, on reçoit un de ces gros appels. Quelque chose de si traumatisant que, pour ma part, je ne pense pas qu’il soit approprié de le raconter lors de réunions ou même simplement à des amis », ajoute-t-il.
Andrew explique que les premiers répondants ont tendance à garder leurs pensées pour eux, ce qui peut entraîner encore plus de problèmes.
« J’ai déjà essayé de partager certaines histoires, mais j’ai l’impression que les gens pensent que j’essaie de m’expliquer et de gonfler mon ego à cause du travail que je fais. En réalité, j’essaie juste de me confier et d’évacuer les émotions qui se cachent derrière tout ça. Je ne partage donc plus ces histoires avec personne, sauf avec mon conseiller, qui est un inspecteur retraité du service de police de Vancouver. Il peut facilement se mettre à ma place et comprendre ce que j’essaie d’exprimer, » dit-il.
ACCOMPAGNER LES HÉROS DANS LEUR GUÉRISON
« Nous avons le privilège de travailler avec les héros qui nous permettent de faire le travail que nous faisons chaque jour », affirme Juanita Fleming.
« Si j’avais pu créer un endroit où j’aurais voulu travailler à ce moment de ma carrière, je n’aurais pas pu imaginer être ailleurs que là où je suis maintenant. Je côtoie des héros tous les jours », conclut Juanita.
Si vous ou une personne que vous connaissez êtes aux prises avec une dépendance, un TSPT ou un autre trouble de santé mentale, veuillez communiquer avec EHN Canada au 866-867-5787 pour discuter des options de traitement possibles.